Avec maîtrise et sobriété, Delphine de Vigan livre un essai romanesque sur les relations entre les êtres. Plus philosophique que ces précédents ouvrages, Les loyautés interroge sur la parole, au sens propre, comme au sens figuré.
Une percée vibrante au cœur des fragilités humaines.
La quatrième de couverture…
« J’ai pensé que le gamin était maltraité, j’y ai pensé très vite, peut-être pas les premiers jours mais pas longtemps après la rentrée, c’était quelque chose dans sa façon se tenir, de se soustraire au regard, je connais ça, je connais ça par cœur, une manière de se fondre dans le décor, de se laisser traverser par la lumière. Sauf qu’avec moi, ça ne marche pas. »
Théo, enfant du divorce, entraîne son ami Mathis sur des terrains dangereux. Hélène, professeur de collège à l’enfance violentée, s’inquiète pour Théo : serait-il en danger dans sa famille ?
Quant à Cécile, la mère de Mathis, elle voit son équilibre familial vaciller, au moment où elle aurait besoin de soutien pour protéger son fils. Les loyautés sont autant de liens invisibles qui relient et enchaînent ces quatre personnages.
Engagement, fidélité ou dévouement ?
Au sein des Loyautés, tout est question d’apparences, un petit jeu consistant à protéger ceux que l’on aime.
Théo est un jeune garçon précocement adulte, qui s’inquiète pour son père, et tente de fuir le poids de son quotidien. À travers l’ivresse, il cherche à se perdre, à disparaître, peut-être même. Tout, pour ne pas avoir à parler. Mathis et Hélène s’inquiètent pour Théo. Cécile, mère de Mathis, s’inquiète pour son fils.
Dans ce cercle fermé gravitent des regards compatissants, juges, ou admiratifs. Chacun cache en lui de nombreuses blessures, de multiples incompréhensions. Tous s’interrogent sur les raisons qui nous poussent parfois à nous taire, ou à agir en accord avec des principes invisibles. À partir de quel moment trahit-on les autres pour soi-même ?
Dans son format court, mais immersif, Delphine de Vigan prend de la hauteur sur un sujet de société : la difficulté de se choisir entre altruisme et égoïsme. En prêtant sa plume à différentes voix, elle dépose un témoignage dénué de parti pris, et ne tire aucune morale. Elle constate, c’est l’essentiel. Comme toujours, elle s’arme d’une technicité impeccable pour décrire avec précision les relations qui se tissent entre les êtres. La maîtrise est parfaite et le message passe : les apparences sont souvent trompeuses.L’emprise sur le lecteur est peut-être moins vive que dans ses précédents ouvrages. La chute brutale nous laisse un peu sur notre faim, mais c’est une jolie découverte.
Pour résumer…
Les loyautés est un roman choral. À travers les voix de quatre personnages, chacun lié aux autres par l’une de ces fidélités, Delphine de Vigan interroge notre capacité à sortir de nos certitudes silencieuses : ces promesses que l’on se fait à soi-même, ces paroles frustes que l’on ose distiller, comme un brouillard qui assombrit les relations.
Son style est détaché, mais juste. Elle ne juge rien ni personne, s’interdit toute forme de compassion. Seul le constat compte. À découvrir pour prendre de la hauteur.
Ma note…
15/20
Les loyautés
Delphine de Vigan
192 p. Le livre de poche, 7,20 €
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D’après une histoire vraie